Chorégraphe reconnue à travers le monde pour ses œuvres emplies de fougue, de vulnérabilité et d’images fortes, Virginie Brunelle relève les défis avec pragmatisme et sensibilité. Dans cette entrevue, elle nous révèle ses intentions pour Minuit quelque part, quelques sources d’inspiration artistique, et entre les lignes, sa grande générosité !
Qu’est-ce que la thématique de ton tableau t’inspire ?
Virginie : Ma thématique est “Je te veux à minuit”, c’est très ouvert. La musique est très différente de ce que j’avais anticipé, ce qui est très intéressant. Je ne veux pas m’éloigner de mon amour de la physicalité, de cette fougue dans laquelle j'évolue depuis mes débuts. La thématique de mon tableau m’inspire quelque chose d’hyper rythmé, une soirée très animée, où les gens ont chaud car ils ont dansé pendant des heures. Je vois quelque chose de très vibrant, dans la dépense d'énergie, avec bien sûr des moments d’accalmie.
Qu’est-ce qui t’excite le plus dans ce projet collectif ?
Virginie : Je suis contente de savoir qu’il sera possible d’avoir l’esprit de famille dans lequel j’aime travailler pour pousser plus loin la physicalité et l’intimité.
Y a-t-il quelqu’un avec qui tu as particulièrement hâte de travailler ?
Virginie : Parallèlement à ce projet, je viens de commencer à travailler avec Julie Basse (conceptrice des éclairages) et je suis contente qu’elle soit dans l’équipe du spectacle. Ça fait longtemps que je me disais que ce serait intéressant de collaborer avec une femme aux éclairages, parce que c’est plus rare et parce que j’ai vu certaines de ses conceptions que j’ai trouvé super belles. Sinon, pour les danseurs je suis excitée de travailler avec tout le monde ! C’est quand même rare qu’on a l’opportunité d’avoir dix danseurs.
Trois mots qui définissent ta signature chorégraphique ?
Virginie :
Transparence/vulnérabilité/humanité (l’humain avant tout)
Rigueur/fureur/dépense physique
Poésie/images saisissantes et symboliques
Où se situe Minuit quelque part dans ton parcours en tant que chorégraphe ?
Virginie : Il s’agit de ma deuxième commande à vie. Ma première était en 2018 avec Gauthier Danse en Allemagne, et j'étais stressée parce que j'avais un temps limité pour créer avec des danseurs que je ne connaissais pas, alors que je suis habituée à créer pour ma compagnie et à prendre mon temps. Avec mon expérience, je me dis que je ne dois pas essayer de faire comme si c’était mes créations avec mes danseurs, parce que ce n’est pas possible. Pour une commande, je dois arriver très préparée, et ne pas remettre en question mes idées, parce que je n’ai pas de temps pour ça !
J’allais justement te demander comment tu abordes la commande chorégraphique.
Virginie : J’essaie de l'aborder avec une forme de naïveté, une sorte de candeur de la création. Je veux m'évader le plus possible de mes craintes et de mes anticipations. Je crois que le contexte aide, parce que j’ai un temps concis pour créer une durée précise, donc il faut que ça avance. Dans le temps alloué, je dois rencontrer les interprètes et comprendre comment ils fonctionnent, donc ça amène une autre manière de travailler et ça demande une adaptabilité.
Du côté de la culture populaire et contemporaine, peux-tu nous partager quelques-unes de tes influences ?
Virginie : (Après un moment de réflexion) Je vais être super “cliché”, mais Beyoncé a une façon très contemporaine d’aborder la physicalité, que je trouve intéressante pour son côté désarticulé. Toujours dans la culture populaire, je me suis souvent inspirée de mouvements de danse acrobatique sociale ou swing. Il y a souvent de petits bonbons là-dedans pour le travail de partenariat. Du côté des influences contemporaines, la musique de Max Richter et de Philip Glass m'inspire beaucoup. Il y a quelque chose d’hyper cartésien et de très rythmique qu’on retrouve aussi dans la musique classique. Et c’est sûr que la théâtralité de Pina Bausch a été un déclic pour moi quand j’ai commencé la danse.
Pour faire découvrir le monde de l’art contemporain à un néophyte, quelle oeuvre proposerais-tu ?
Virginie : Café Müller, de Pina Bausch. Quand j’ai découvert cette pièce-là en vidéo, j’ai pensé : “Oh my god, ça peut être ça aussi la danse !”. Ça m’a suivi tout au long de mon processus, quand je développais ma signature chorégraphique. Je l’ai vu en vrai il y a quelques années à Ottawa, et je pense qu’après deux minutes je pleurais déjà ! C’est une pièce culte de Pina Bausch. Il y a de tout : le côté théâtral, une sensibilité, une vulnérabilité, et en même temps une physicalité dans des élans d'enchaînements… c’est comme un film dansé. C’est beau, c’est beau, c’est beau ! Je ne sais pas si c’est la meilleure pièce à proposer à quelqu’un qui n'a jamais consommé d'art contemporain, mais je pense qu’on ne peut pas rester indifférent face à ça. En tous cas, pas moi !
Un “plaisir coupable” pop ?
Virginie : Le reggaeton, ça me donne vraiment envie de danser !
Si tu devais choisir un endroit pour célébrer la nuit, ce serait lequel ?
Virginie : Je suis plus du genre party à la maison, donc ce serait dans un party privé, dans une belle grande maison d’un ami architecte, avec un DJ et une piscine sur le toit. Mais je n’ai pas d’ami·e architecte avec une piscine sur le toit de sa maison (rires), alors juste une belle soirée dans un appartement ou une maison, avec plein d’amis et d’amis d’amis et où tout le monde danse et rit.
Parmi ses projets cette année, Virginie travaille sur Royal, une pièce de théâtre dont elle signe la co-mise en scène chez Duceppe, et une nouvelle création est en cours avec sa compagnie.
Découvrez quand la passion de Virginie passera près de chez vous !